COMMUNIQUÉ DE PRESSE

 

PAULO BRUSCKY

“ETCETERART”

 

   En 2014, le MAM de São Paulo a organisé une exposition rétrospective de Paulo Bruscky, artiste originaire de la ville de Recife dans le Nordeste brésilien. Nous l’avions, en 1994, visité dans son atelier-archive de cette ville, atelier qui a été transporté, papier par papier, en 2004 à la 1ère Biennale de São Paulo qui a eu lieu après la victoire de Lula. Dans cette exposition au MAM, un des vendeurs ambulants du parc d’Ibirapuera venait vendre ses produits dans une des salles de l’exposition, soit le thème de la présence de la vie à l’extérieur du lieu d’exposition, à l’intérieur de l’exposition. 

   Dans les années 1970 / 1980, il va travailler avec le super 8 et la vidéo, empruntant l’équipement U-MATIC du département de Télécommunications de l’Université de Pernambuco, produisant 29 films d’artiste.

   Il a participé aussi activement aux mouvements du copy-art, travaillant à New York avec la firme Xerox, et du mail-art, organisant de nombreuses expositions. Et là, il faut rappeler qu’au moment de la dictature militaire au Brésil, un des moyens pour les artistes de faire connaître leurs travaux à l’étranger était l’art postal. D’ailleurs la Police Fédérale fermera son exposition d’Art Postal en 1976, et il sera arrêté et condamné parce qu’il faisait de l’art.

   Une performance célèbre, le 14 mars 1977, pour la Journée Nationale de la Poésie, en “Outdoor”, terme qu’il a inventé avec l’artiste Daniel Santiago, donc dans l’espace urbain, consistera pour les participants à porter chacun une des lettres de l’expression POESIA VIVA sur un vêtement blanc. « Outdoor » aussi, Paulo Bruscky organisera la 1ère exposition de « arte em outdoor » en février 1981, sous forme de panneaux publicitaires confiés à des artistes  dans l’espace de la ville.

   Une exposition récente en Espagne à la Fondation Luis Ceoane à La Corogne (2018) donne un panorama de la diversité de ses activités artistiques : Il y avait une section “Arte classificada”, soit des petites annonces dans les journaux de Recife comme « À VENDRE / Le projet d’une machine à filmer les rêves… » ou encore, dans le “Village Voice” du 25 mai 1982 : « AIR ART / Proposal of colored clouds in the sky of New York. » ; puis une section : « ARTE CORREIO MAIL ART », Art Postal, dont une action de 1975 consistant en une enveloppe de 1,80 m sur 0,90, mais aussi « retour à l’expéditeur » (1979) ; autre section : « ARTISTAS ACHADOS E APROPRIADOS », « Artistes trouvés et appropriés », avec, par exemple, ce sac en plastique à motifs géométriques qui devient un Sacilotto, démarche à rapprocher d’artistes américains qui pratiquent l’appropriation artistique comme Louise Lawler ; autre section : « BANCO DE IDEIAS », « Banque d’idées » (1982-1993) sous forme de livres d’artiste avec des projets ; puis une section « INVENTOS », « Inventions », comme cette machine à traduire pour enfants et animaux ; une section « Hommages » comme cet « Hommage à Fluxus », le dessin d’un bœuf de boucherie avec, au lieu de « collier, côtes premières, macreuse, paleron » :  « Brecht, Vautier, Beuys, Flynt » ; une section « Livres d’artiste », avec, pour illustrer « Esthétique de la Santé » (2010), une photo de cimetière ; une section « Poésie Visuelle », avec ce projet “VIVA ! VIVA ! POESIA VIVA”, pour les 10 ans du Poème Processus (1967-1977), ou ce poème limité à 70 simples lignes, ou « L’art est ce qui paraît être et n’est pas » (1975), œuvre que l’on pourrait qualifier de conceptuelle, ou encore ce « Pour nos disparus » de 1976 écrit à l’encre rouge sous une photo de disparu en négatif, œuvre militante par rapport à la dictature militaire ; une section « Propositions », comme ce « Voie ferrée - Ciné parcours », soit l’idée d’un film sans caméra ni projecteur qui consiste à mettre des photogrammes entre les rails, et le projecteur sera le train en mouvement, ou ce panneau « Qu’est-ce que l’art ? À quoi il sert ? » qu’il a sur sa poitrine (1978), tout en se promenant dans la rue devant la librairie Moderna à Recife, ou encore à l’occasion du XXIème Salon Officiel d’Art à Recife (1978), cette phrase peinte sur le mur extérieur du Musée : « L’art ne peut pas être fait prisonnier », ce qui a engendré toute une série de réactions de la part des officiels.

   Si Paulo Bruscky a pratiqué la typoésie avec le médium machine à écrire, il ne faut pas oublier chez lui la dimension de poésie “élargie”, avec par exemple ses “Poemas Flutuantes” en 1968, ses “Poèmes Flottants”, consistant à jeter des lettres colorées qui flottent à partir des 5 ponts de la rivière Capibaribe (Recife est entouré d’eaux), ce poème sous le titre de “Exponáutica e Expogente” consistant à faire flotter des lettres sur la plage de Boa Viagem à Recife en 1970, ou ce poème objet comme ce « L’art sera-t-il toujours un poids sur la conscience du pouvoir ? » de 1973. 

   Paulo Bruscky sera aussi proche de Wlademir Dias-Pino et participera au mouvement du Poème/Processus. Il faut enfin souligner ici la relation amicale qu’il a eu avec Hélio Oiticica qu’il invitera à réaliser ses “Parangolés das capas” à Recife en 1979, une première au Brésil. Paulo Bruscky avait reçu en 1981 la Bourse Guggenheim d’Arts Visuels, ce qui lui a permis de résider un an à New York en 1982. 

   Il est considéré comme un artiste conceptuel, mais il y a la dimension de ce pays continent qu’est le Brésil. Comme il le dit : « Dès que vous travaillez sur quelque chose de conceptuel, vous êtes en train de le faire au moment même où vous en avez l’idée. » Et en même temps, il a une revendication du caractère éphémère de l’art : « Je suis concerné par l’éphémère ; nous sommes éphémères, donc pourquoi l’art ne peut-il pas être éphémère ! Je suis concerné par l’idée, et non par la réalisation parfaite des choses. » Dans le même esprit, il dit : « Pour moi, la recherche est de prendre des choses dans la rue, comme un exercice sur l’inutilité. » 

 

 

Galerie Satellite, 7 rue François de Neufchâteau, 75011 Paris, 

métro Charonne, 01 43 79 80 20

du mardi au samedi de 13h à 19h, du 25 mai (vernissage) au 12 juin 2024